Celui-là aura été plus dur à hisser…
Le marché aux poissons de Kristiansand
Avec Debi et Jack, nos amis américains en route depuis le Michigan sur leur Ohlson 38
Le Forspill (en français « pré-soirée », ou « forplay » en anglais, voire « pre-funk » aux US) est un concept bien norvégien qui désigne le fait de se bourrer la gueule à la maison (donc pour pas cher) avant de sortir se finir en ville, où (le prix de) la dernière bière se charge généralement du coup de grâce. L’objectif est clair : économiser sur le coût total de la cuite. Nous découvrons cette culture de l’alcool décomplexée, massivement répandue en Scandinavie, au sein d’un groupe d’étudiants fêtards qui se réunissent chaque soir sur l’île d’Odderøya, où se tient un festival de musique locale.
Le rendez-vous est donné dans un bar du centre-ville. Elena me prend à partie : « Tu as encore des bières dans ton sac ? » J’acquiesce. « Suis-moi ». Je m’exécute. Elle traverse la rue, s’agenouille, soulève la grille des égouts et y glisse ses bières, puis les miennes. A la vue des sacs qui s’empilent déjà, elle ne doit pas être la première à avoir cette idée. « N’oublie pas de les récupérer après » me glisse-t-elle simplement. Le gardien du pub nous a vu et nous fait entrer sans fouiller nos sacs. Welcome to Norway !
A l’heure où ferment les derniers bars, le Nattspill, littéralement le « jeu nocturne » (night play) peut démarrer. Comme son nom l’indique, il est encore question ici d’alcool, de fumette et plus si affinités. A la différence que le nattspill se déroule plutôt hors de la ville. Soyons clairs : quand les Norvégiens se torchent, ils se torchent. Un viking à dreadlocks m’en fournira la raison principale : « L’alcool est si cher ici que boire sans se saouler revient à jeter l’argent par les fenêtres ». Voilà qui a le mérite d’être clair comme de l’eau-de-vie. Le gouvernement norvégien encourage même ces excès en octroyant officiellement un jour de congé maladie pour « gueule de bois ».
Dans les rues, la guitare que porte en permanence Ruud sur le dos est un sésame. Les contacts se nouent, des bœufs nocturnes s’improvisent. Ces norvégiens-là se révèlent chaleureux et très curieux. OK, l’alcool et la fumette y sont peut-être vaguement pour quelque chose… En tout cas, cette Norvège, on l’aime !
Une des « petites » courgettes bio du potager de Ruud, clé de notre autosuffisance alimentaire !
Blindleia… tout au fond : la mer [click to enlarge !]
Côté navigation, la bonne nouvelle est qu’une fois arrivé en Norvège, il est possible de naviguer le long du littoral norvégien en restant presque toujours protégé des caprices de la météo grâce au Skjærgård, une sorte d’archipel faisant rempart entre côte et mer, constitué d’îles, d’îlots ou de roches. Le sonar prospectif n’est ici pas un luxe inutile et permet de s’aventurer sans trop de stress dans certains passages inshore, dont l’exceptionnel Blindleia, en direction de Lillesand.
Les marques latérales de chenal sont ici souvent « en dur »
Le mouillage dont je rêvais depuis toujours
… vu de haut [click to enlarge]
https://www.youtube.com/watch?v=9VavWHuHUPY
Images en route (hors épisode Skagerrak…)
Bonjour
Une question technique sur la manœuvrabilité du bateau du fait de sa quille longue, est-ce gênant en manœuvre de port ou est-ce une question d’habitude ?
Et une deuxième question concernant la formation maritime, avez vous suivi des stages et dans quel organisme ?
Félicitation pour votre joli blog et peut être au plaisir de prendre une bière dans un port..
Fabien (Compiègne, France)
Bonsoir Fabien,
Pour résumer, la quille longue c’est : génial en mer (stabilité de route, passage dans les vagues en douceur, le bateau ne tape pas mais chevauche tranquillement, la cape est très efficace) mais horrible au moteur en marche arrière pour les manœuvres de port en solo : l’effet d’hélice est amplifié, le rayon de braquage très important, etc. On finit évidemment par s’y habituer (un peu) : je ne m’obstine plus, laisse le bateau faire et improvise au dernier moment… Le bilan pour moi, après 3 saisons sur Pando2 est cependant évident : j’accepte complètement de galérer au moteur pour le comportement en mer, inégalable, sécurisant, d’une quille longue. Un autre avantage de taille est la solidité de construction d’une coque en S, la quille jouant le rôle de colonne vertébrale, le TE est réduit, les œuvres vives sont plus compactes, avantage en cas d’échouage de marée, le risque de perdre la quille ou le safran est inexistant, l’hélice est complètement protégée, etc. Côté navigation, la quille longue (ou semi-longue, avec safran sur skeg, sans doute le meilleur compromis) me semble le choix de la sagesse en solo : une coque moderne en U, avec quille fine, bien que plus maniable et nerveuse, a constamment besoin d’être barrée, ce qui est la dernière chose dont j’ai besoin en solitaire. Sur une carène classique, le risque de départ au lof dans le gros temps est très limité, le bateau reste sur des rails et je laisse le régulateur faire le travail (jusqu’à une limite qu’il me reste à découvrir 😉 A voir : ce récent comparatif (magazine « Segeln » en allemand) de 3 types de carènes vu sous l’angle du confort en mer : le verdict est sans appel.
Formation maritime : à peu près rien, hormis un stage de 2 semaines aux Glénans. Mais tous les grands classiques de la littérature maritime lus et relus depuis l’adolescence, Moitessier, Janichon et consorts. J’ai grandi dans le 93, loin de la mer 😉
Au plaisir de boire une bière avec toi!