New Amsterdam

Last run of the year : Portsmouth - New York City, 300 NM
Last run of the year : Portsmouth – New York City, 300 NM
hisageDepuis les Bahamas, la barre est tellement dure que le pilote auto est inutilisable. J’ai dû barrer tout l’Intracoastal des deux mains (2000 nm), sans une minute de répit. La force à exercer est telle que ma nouvelle barre franche des Canaries, en iroko, s’est brisée.

A Portsmouth, l’arrivée de mon père m’encourage à traiter le problème une bonne fois pour toute : dépose des safrans, de la barre de mèche centrale, changement des rotules, des 3 clavettes, compensation du jeu des bras dans les mèches, polissage et graissages en tous genres…

2 sorties de l’eau et 2 semaines de travail plus tard… si la facture est salée, la barre n’a jamais été aussi douce!

Mon père au chevet du safran... plus heureux sur un chantier qu'en mer ?
Mon père au chevet du safran… plus heureux sur un chantier qu’en mer ?
Noah et Ellen partent avant, mon père et moi filerons seuls sur NYC
Noah et Ellen partent avant, mon père et moi filerons seuls sur NYC

Réveil à 5h30. Nous quittons le port de Hampton avant l’aube, et mettons le cap sur Cape Charles, à l’embouchure de la baie de Chesapeake.

Premier contact avec l’océan depuis Miami. Nous avons choisi de couper au plus court et de filer par la mer. New York nous appelle. Après 4 mois sous génois seul, la grande voile est de nouveau hissée. Le vent est hésitant, la légère houle devrait nous rappeler que les règles du jeu ont changé… Je laisse mon père à la barre et descends me coucher. Sur les conseils d’un plaisancier local, nous restons à 2 miles des côtes.

Je dors depuis un moment dans le carré quand une vague vient s’abattre comme une gifle, elle balaye littéralement le pont et s’écrase violemment dans le cockpit. Je saute sur le pont, l’esprit embué. L’horizon est blanc, le bateau cerné d’écume. Incrédulité. Coup d’œil au sondeur : 1,40m. Panique. 1,40m d’eau à 8km des côtes… Un haut-fond. On va se faire drosser.

La carte! Mauvaise échelle, les sondes des 10 premiers miles ne figurent pas. Mon père, à la barre, hurle les coordonnées GPS. Faire le point. C’est où la sortie!? Un autre cap, vite. A l’est, ça semble pire. Faire demi-tour. Le sondeur descend à 1,20m : vision de cauchemar. La mer est courte, hachée. Pando tombe lourdement dans chaque creux. Est-ce qu’on touche? Le moteur est à fond. Fuir, fuir ce trou à rat.

Quand, cinq horribles minutes plus tard, le sondeur se décide à remonter, l’écume n’est plus que sur nos visages. Sentiment de revenir de loin.

Petit rappel océanique, façon… grande claque dans la gueule.
Quitter le « mode fluvial », et vite! Se « reconnecter ». Scruter le ciel et déchiffrer l’horizon.

 "Le danger en mer, c'est la terre..." La pire situation vécue sur Pando.
« Le danger en mer, c’est la terre… » Pire situation vécue sur Pando.

Plus tard, nous apprendrons que nous avons traversé un haut-fond (shoal) parfaitement cartographié, baptisé Nautilus… Nous maudissons le marin d’eau douce qui nous a conseillé de rester près des côtes et mettons cap plein large.

La pression redescend, à l’inverse de mon envie de gerber : typique. 3g de vitamine C et un antihistaminique plus tard, le problème est réglé. Côté vent, c’est moins simple, le SE annoncé n’est pas du tout au rendez-vous. La brise Perkins est la bienvenue pour appuyer les voiles. Je n’ai pas fait le plein avant de partir, confiant dans la NASA qui nous promettait une traversée rapide. A ce rythme, il va falloir relâcher à Ocean City, THE station balnéaire du Maryland, en profiter pour acheter une vraie carte d’approche et attendre que le vent tourne. norfolk-copie-copie-2La nuit tombe, nous filons doucement. Nouilles chinoises. Mark Knopfler dans le cockpit. Demi-lune. Je fais le premier quart, jusqu’à 02h00. C’est peut-être ma dernière nuit en mer de l’année : la savourer.

 ***

Quand mon père me réveille, l’aube pointe. Nous ne sommes plus très loin d’Ocean City. Sans carte d’approche. Le stress revient. Peur des hauts-fonds. Aucun bateau dans le coin pour nous dire si la voie est libre. Je décroche la VHF et appelle les Coast Gard, sur le 16 :

– Good morning, sir. This is Pandorak, a french sailing boat. We want to enter Ocean City. Our position is 6 miles east of the red buoy R4. We don’t have the right chart. Could you tell us if there is any shoal on our way to the inlet?

– Sorry captain, but I can’t give you this information.

J’ai pas dû être clair… je recommence :

– Sir, we don’t know the depths. We’ve just lost our chart (bon là j’invente). We just need this information. Our draft is 3 feet (ma voix se fait presque suppliante) Thank you very much for helping us…

– Sorry Captain, I am not allowed to give you this information.

Pour le coup, je suis scotché. Dois-je me mettre à genoux? Je suis en mer. Le type a le cul sur sa chaise, il connaît le coin et sait où on est. Il n’a qu’un mot à dire : SHOAL OU PAS.

Il ne le dira pas. Je retente. Peine perdue. C’est le coup de grâce. Et LE DEVOIR D’ASSISTANCE EN MER BORDEL?? L’ARTICLE 67-545 DU CODE PENAL??

Surtout, ne pas les haïr.

Tous ces connards en uniforme. Tous ces pauvres types inutiles, dans leur bureau climatisé, le colt en évidence. Et toutes leurs règles à la con… l’Amérique déborde de règles à la con. Ce pauvre type doit sans doute respecter une de ces règles… une règle inconnue des gens de mer, qui ont su en imposer une autre, au fil des siècles : la solidarité.

A QUOI SERT UN COAST GUARD US?

A garder la côte. Pas à dépanner un petit voilier jaune. N’oublions pas que l’USCG est la « première ligne de défense du pays ». oulaa, ça rigole pas… une attaque des USA par la mer, évidemment…

Je suis pas prêt d’oublier la leçon. Les Coast Guards ne sont pas les gars du CROSS. Les sauveteurs US ne sont pas les bénévoles de la SNSM. Sans doute faudrait-il lâcher un bon paquet de dollars à un remorqueur pour obtenir ce genre d’informations?

Bon, y avait pas de shoals du tout. On y est allé tout doux, les yeux rivés sur le sondeur, et on est rentré sans problème. Que risquait-il à nous le dire?

***

Skyline en vue...
Skyline en vue…
Les premières lumières de New York... mais la ville est encore loin
Les premières lumières de New York… mais la ville est encore loin

lampeNous qui espérions arriver avant la nuit…

Nous progressons pourtant au bon plein dans l’immense baie intérieur de NYC mais l’Hudson, très puissant, nous refoule… comme pour nous forcer à attendre encore un peu…

Et puis la nuit tombe. Progressivement, les lumières grossissent. Le spectacle peut commencer…

Verrazano Bridge en vue, reliant Brooklyn (droite) à Staten Island (gauche), longtemps le plus long pont suspendu du monde
Verrazano Bridge en vue, reliant Brooklyn (droite) à Staten Island (gauche),
longtemps le plus long pont suspendu du monde

Il a été baptisé en l’honneur de l’explorateur italien Giovanni da Verrazano, le premier Européen à avoir franchi les Narrows et à avoir posé le pied sur l’actuelle New York, le 17 avril 1524. Il cherchait un accès vers le Pacifique…

Vertical clearance : 210 mètres. Pas de problème de tirant d'air pour Pando...
Vertical clearance : 210 mètres. Pas de problème de tirant d’air pour Pando…
Là! Sur bâbord...
Là! Sur bâbord…
...The Lady!
…The Lady!
Cap irréel sur Manhattan
Cap irréel sur Manhattan
Réveil magique face à la 88ème... on capte déjà l'énergie de la ville
Réveil magique face à la 88ème… on capte déjà l’énergie de la ville
A partir de maintenant, il va falloir lever la tête...
A partir de maintenant, il va falloir lever la tête…
D'Amsterdam à New Amsterdam ! 9000 NM, soit 16.668 km parcourus.
D’Amsterdam à New Amsterdam !
9000 NM, soit 16.668 km parcourus.
Retrouvailles avec ma cousine Stef, installée à Manhattan, qui nous sert de guide
Retrouvailles avec ma cousine Stef, installée à Manhattan, qui nous sert de guide
Time Square
Time Square
Petite marina derrière le World Financial Center... 6 $/pied par jour, soit 180 $ pour Pando... on préfère le mouillage (gratuit) sur l'Hudson !
Petite marina derrière le World Financial Center… 6 $/pied par jour, soit 180 $ pour Pando… on préfère le mouillage (gratuit) sur l’Hudson !

Parc sur Manhattan

Parc sur Manhattan

 Hall principal de Grand Central... sans doute la gare la plus filmée au monde.
Hall principal de Grand Central…
sans doute la gare la plus filmée au monde.
La ville des torticolis
La ville des torticolis
Sortie de Grand Central avec le Chrysler Building au fond
Sortie de Grand Central avec le Chrysler Building au fond
Ground Zero : Il faut s'imaginer les tours jumelles, deux fois plus grandes que les building voisins
Ground Zero :
Il faut s’imaginer les tours jumelles deux fois plus grandes que les building voisins
Dessins d'enfants sur 09/11
Dessins d’enfants sur 09/11

CARTESWashington Bridge : remontée de l'Hudson : temps d'hiverner Pando !Washington Bridge : remontée de l’Hudson : temps d’hiverner Pando !

Nettoyage des écoutes, dessalage des voiles, hivernage des moteurs...
Nettoyage des écoutes, dessalage des voiles, hivernage des moteurs…
En un mot : tout vider, nettoyer, graisser, protéger... les hivers new-yorkais sont rudes
En un mot : tout vider, nettoyer, graisser, protéger…
les hivers new-yorkais sont rudes
Rideau pour cette année! 2009 aura été un très grand cru. Merci Pando...
Rideau pour cette année!
2009 aura été un très grand cru.
Merci Pando…

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